Le site Eduscol propose ICI un ensemble de conférences sur l'évolution des échanges et de la lecture à l'ère du numérique. Parmi les nombreuses contributions, celle d'Olivier Donnat, sociologue au département des études, de la prospective et des statistiques du ministère de la Culture et de la Communication, est résumée ci-dessous.
L’évolution des
pratiques culturelles et la place de la
lecture
La lecture est probablement la plus polymorphe
des pratiques culturelles, qui donne
lieu à différents types d'activités et de supports. (lecture plaisir, la
lecture professionnelle, les lectures ordinaires, etc). Sa quantification qui posait déjà problème
avant le numérique, est encore plus problématique depuis car on ne sait pas
mesurer les actes de lectures sur écran. L’exposé porte uniquement de la
lecture d'imprimés de presse, et de livres, en dehors de toutes contraintes
scolaires ou professionnelles.
Depuis 1973, il y a eu 5 enquêtes sur les pratiques
culturelles (de 1973, 1981, 1988, 1997
et 2008) qui permettent de retracer une évolution sur les 35 dernières années,
ce qui couvre presque 2 générations,.
On constate d'une part une baisse de la lecture
de presse papier payante, d’autre part un effritement de la proportion des
forts lecteurs. Ces deux mouvements antérieurs à l'arrivée numérique peuvent être
imputés directement à la montée en puissance de la culture d'écran.
La dynamique de cette double baisse est essentiellement
d'ordre générationnel : les jeunes générations arrivent à l'âge adulte
avec un niveau d'investissement dans la lecture inférieur à celui des
générations précédentes. Mouvement paradoxal, au vu des progrès considérables
de la scolarisation qui voit doubler le nombre de diplômés durant la même
période.
On constate trois tendances :
- Ce retrait des jeunes est amorti par l’arrivée à l’âge de la
retraite des baby boomers qui ont un niveau de lecture nettement supérieur aux
générations précédentes.
- La baisse est davantage liée aux garçons qu’aux filles,
responsables de la progression de la
fréquentation des bibliothèques, dans les années 80 et 90.
- Le livre décroche dans les milieux populaires, et notamment dans
les rangs masculins avec 52% des hommes de milieu ouvriers se déclarant
non-lecteurs
La prudence demeure de rigueur pour interpréter
ces données car il faut se rappeler que nous sommes sur du déclaratif.
On peut avancer 4 séries de facteurs pour expliquer
ce recul :
-
Le premier c'est la diversification considérable des offres de
loisir, depuis les années 70, qui a engendré un phénomène de concurrence
objective sur les usages du temps libre. Les
activités les plus chronophages, subissent une concurrence
réelle face à la montée en puissance de la culture d'écran –télévision,
ordinateurs, jeux videos, téléphones
portables à communication interpersonnelle).
-
Deuxième élément : une progression des livres pratiques et
des bandes dessinées, que l'on a avoir plus de mal à déclarer dans la mesure où
l'on a tendance à penser au roman quand l'on pose cette question.
-
Le troisième facteur d'explication, c'est la transformation du
système scolaire et la prépondérance acquise par les filières scientifiques par
rapport aux humanités dans la formation
des élites.
-
Le quatrième élément c’est la pression sociale très forte sur les
enfants pour qu'ils lisent, qui ne laisse plus d'espace, comme par le
passé, à la transgression au moment de
l'adolescence
Ces 4 séries de facteurs, permettent de
comprendre la baisse de la lecture, telle qu'elle est enregistrée dans une
enquête, comme pratique culturelle.
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